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    AccueilEnquêtesMarchés des ILS et des aéroports : 50 milliards F.CFA inexpliqués

    Marchés des ILS et des aéroports : 50 milliards F.CFA inexpliqués

    Entre surfacturation sur le marché de l’ILS de Korhogo et non-respect des délais et des procédures, le marché des aéroports, attribué par le ministère des Transports à EBOMAF, révèle un énorme scandale financier. Au centre de cette surfacturation, le ministre des Transports-Amadou Koné- et l’entreprise EBOMAF du Burkinabé Mahamadou Bonkoungou.

    C’est en 2018 que EBOMAF (Entreprise Bonkoungou Mahamadou & Fils), se voit attribuer un premier marché ivoirien dans le domaine aéroportuaire. D’un montant de soixante-huit milliards six cent soixante-quatre millions quatre cent vingt-six mille cent douze (68.664.426.112) Francs CFA, le contrat -qui porte sur la réhabilitation des aéroports de Korhogo, San Pedro, Séguéla et Kong- est accordé, de gré à gré, dans des conditions jugées opaques, à la société de droit burkinabé.

    La passation du marché de l’ILS pose problème

    En sus d’un contrat initial de plus de 68 milliards de Francs CFA, le 16 janvier 2020, le ministre des Transports sollicite une dérogation de son homologue du Budget aux fins de lui permettre d’accorder un nouveau « marché de gré à gré d’un montant de trente-deux milliards neuf cent soixante-cinq millions soixante-dix mille (32 965 070 000) Francs CFA au profit de la société EBOMAF SA, afin de prendre en charge la réalisation des installations des ILS/DME sur les aéroports de Korhogo et Bouaké y compris les travaux  de terrassement nécessaires à leurs mises en route. Cette nouvelle demande qui est accordée, porte le total marché accordé de gré à gré à EBOMAF à cent un milliards six cent vingt-neuf millions quatre cent quatre-vingt-seize mille cent douze (101 629 496 112) Francs CFA, en violation des règles.

    La preuve des contre-vérités du ministre des transports, Amadou Koné/ Photo-DR

    En effet, si le gré à gré est tout à fait légal, il est encadré par des conditions très strictes, afin d’éviter des abus et du favoritisme. Entre autres exigences fondamentales, il y a celle de justifier d’une forte expérience dans l’activité, par l’entreprise choisie. Or, au moment de la signature du premier marché, comme lors de l’octroi du second contrat, EBOMAF ne justifiait pratiquement d’aucune référence dans le domaine de la construction des aéroports. L’entreprise de monsieur Mahamadou Bonkoungou était donc disqualifiée pour prétendre à ce marché. Et les nombreux retards dans l’exécution de cette convention allaient confirmer l’inopportunité de ce choix par le ministre des Transports.

    Le code des marchés publics prévoit par ailleurs que lorsque l’entreprise désignée pour une entente directe est déclarée apte et qualifiée pour le marché, l’Etat s’assure que ses prix restent compétitifs. Dans le cadre du premier marché du montant de soixante-huit milliards six cent soixante-quatre millions quatre cent vingt-six mille cent douze (68.664.426.112) Francs CFA, nous n’avons retrouvé aucune trace de négociations des coûts entre EBOMAF et le ministère des Transports, comme l’exige la législation qui encadre le gré à gré. Par contre, nous avons pu nous procurer des documents sur des négociations de prix entre l’entreprise et le ministère, sur le marché de l’installation des ILS (Instrument Landing System), un outil d’assistance à l’atterrissage des avions. Et ce document révèle une irréfutable surfacturation.

    En effet, comme l’indique le Procès-verbal de négociations dont nous avons pu obtenir une copie, à l’issue des négociations, EBOMAF marque son accord pour installer l’ILS sur l’aéroport de Korhogo à dix milliards trois cent soixante-sept millions (10.367.000.000) Francs CFA. La séance de travail s’est tenue le 12/12/2019, à 17H00, dans la salle DADR du BNETD (Bureau National d’Études Techniques et de Développement). A cette réunion cruciale, EBOMAF était représentée en la personne de son Secrétaire Général, Adama ROUAMBA. Etaient également présents des responsables du BNETD et de la SODEXAM (Société d’Exploitation et de Développement Aéroportuaire, Aéronautique et Météorologue).

    Le devis de EBOMAF qui trahit/ Photo-DR
    Des terrassements de 12 milliards FCFA pour installer un appareil qui tient sur moins de 20m2 …/ Photo-DR

    Pourtant, et de façon surprenante, le ministère des Transports accorde à EBOMAF le marché d’installation de cet ILS de Korhogo pour plus du double du montant initialement convenu, comme l’atteste le contrat signé à cette fin, dont nous avons pu nous procurer copie, révélant ainsi, de manière incontestable, de la surfacturation. Afin de matérialiser ce nouveau contrat, le ministre des Transports, Amadou Koné, demandera à son homologue de l’autoriser à passer un nouveau gré à gré avec EBOMAF, d’un montant de trente-deux milliards neuf cent soixante-cinq millions soixante-dix mille (32 965 070 000) Francs CFA. Cette somme correspond à vingt-trois milliards cent soixante-quinze millions deux cent mille (23 175 200 000 Francs CFA) pour l’installation de l’ILS de Korhogo et à neuf milliards sept cent quatre-vingt-neuf millions huit cent soixante-dix mille (9 789 870 000) Francs CFA pour celui de Bouaké.

    Coût d’installation de l’ILS de l’aéroport de Korhogo/ Photo_DR
    Le ministre du Budget, Moussa Sanogo, a été influencé par son homologue des Transports/ Photo-DR

    Entre le coût pour lequel EBOMAF a accepté d’installer l’ILS de Korhogo (10.367.000.000) Francs CFA et la somme qui lui a été curieusement payée par le ministère des Transports pour ces mêmes travaux (23 175 200 000 Francs CFA), l’Etat a été délesté de douze milliards huit cent huit millions deux cent mille (12 808 200 000) Francs CFA.

    La surfacturation évidente

    Notre enquête a pu mettre en évidence la méthode par laquelle les douze milliards huit cent huit millions deux cent mille (12 808 200 000) Francs CFA surfacturés à l’Etat seront habilement récupérés, notamment à travers des travaux fictifs facturés.

    Dans ce contrat, il est ainsi facturé des travaux de remblais « en terrain meuble » à 2.775.000.000 FCFA et d’autres dits remblais provenant d’emprunts pour prolongements de la piste à 9.375.000.000 FCFA. Nous avons demandé à un ingénieur des BTP proche du dossier des travaux de l’aéroport de Korhogo de se prononcer sur le tableau du devis d’EBOMAF et sa conclusion est sans ambages : « le premier remblai ne sert qu’à gonfler la facture, puisqu’il n’y a pas, sur l’aéroport, trace de travaux correspondant à ces caractéristiques. Pour les neuf milliards, il s’agit clairement d’une double facturation, le prolongement de la piste étant déjà prévu et facturé dans le marché initial de 68 milliards F.CFA ».

    En analysant le devis de EBOMAF, il est facturé un milliard huit cent cinquante millions 1.850.000.000 FCFA au titre des « Installations générales de chantier et des services généraux de l’entreprise y compris amené et repli du matériel ». Or, il se trouve que ce contrat de l’installation des ILS est un marché supplémentaire pour la même entreprise qui était déjà installée sur l’aéroport de Korhogo. Cette somme cache donc, elle-aussi, une surfacturation.

    L’exécution révèle le mauvais choix du prestataire

    Prévus pour durer douze mois, les travaux de l’installation de l’ILS, tout comme ceux de la réhabilitation de l’aéroport de Korhogo, ont duré quatre ans. Et encore, l’aéroport n’a été réceptionné en mai dernier qu’avec des réserves, comme nous l’a révélé une source haut placée. Des malfaçons ont été constatées et la climatisation de l’aérogare est tombée en panne, à peine quelques jours après l’inauguration officielle.

    Par ailleurs, l’acquisition d’un ILS pour l’aéroport de San Pedro, avant qu’on ne se rende compte, au moment de son installation, que le terrain de cet aéroport ne s’y prêtait pas, trahit le fait que ce marché a été passé sans études techniques et financiers préalables. On se demande donc sur quelle base l’entreprise a fixé ses prix, si elle n’a pas effectué ce prérequis. Il serait tout autant légitime de s’interroger sur les motivations du ministère des Transports qui semble n’avoir pas associé les experts du domaine, qui auraient inévitablement conseillé de sérieuses études préalables.

    L’ILS dont l’installation sur l’aéroport de San Pedro avait été facturée à un peu plus de quatre milliards Francs CFA, sera finalement déployé à Bouaké pour neuf milliards sept cent quatre-vingt-neuf millions huit cent soixante-dix mille (9.789.870.000) Francs CFA. Sur cet ILS-là aussi, l’Etat a perdu plus de cinq milliards Francs CFA.  

    Des milliards pour une technologie obsolète

    Il ressort des documents en notre possession que depuis 20 ans, l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale) a recommandé à ses pays membres d’adopter des systèmes de navigation par satellite tels que le GPS/GBAS (Ground-Based Augmentation System) et le GNSS (Global Navigation Satellite System) en complément ou en remplacement de l’ILS. La FAA (Federal Aviation Administration), l’agence des États-Unis responsable de la réglementation et de la supervision de l’aviation civile dans le pays, a également recommandé l’utilisation des systèmes de navigation satellitaire jugés plus fiables que l’ILS. Plusieurs arguments plaident en faveur des systèmes satellitaires, comme nous avons pu le lire dans des documents de l’OACI : « offrent plusieurs avantages par rapport à l’ILS, notamment une plus grande précision, une couverture mondiale et une réduction des interférences électromagnétiques ».  

    L’ASECNA (Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar), reprenant à son compte les recommandations de l’OACI. L’Agence a donc estimé qu’il n’était plus nécessaire d’installer des ILS et recommandé, là où il en existe déjà, de les coupler au système de navigation par satellite.

    Le contexte, à l’époque, favorise la magouille

    Le contexte de l’attribution de ce marché explique toutes les entorses et aberrations procédurales qu’on a pu constater. « Au moment de la passation de ce marché, explique un haut fonctionnaire qui a suivi toute la procédure, Amadou Gon COULIBALY, cousin du ministre des Transports, était Premier ministre et successeur quasi-certain du président de la République. Personne ne pouvait donc rien refuser au ministre Amadou Koné, qu’on appelait souvent ‘vice-premier ministre’, pour illustrer le pouvoir qu’il avait ». Selon cette source qui a suivi ce dossier et qui s’est exprimée sous anonymat, « l’entreprise EBOMAF, alors même qu’elle n’avait réalisé que 20% des travaux, était déjà à un niveau de décaissement correspondant à ce qu’elle ne devrait recevoir qu’après 60% de réalisations. Rien n’a été normal dans ce marché. Et dire qu’on découvre, après coup, que l’ILS est une technologie dépassée ».

    Selon plusieurs sources haut placées, il n’est pas certain que le Premier ministre d’alors, Amadou Gon COULIBALY, ait eu tous les détails de ce marché.

    Sur la base de l’avis de plusieurs experts consultés et des constatations des travaux réellement effectués sur le chantier, le récapitulatif de tous les montants indûment versés à EBOMAF pour des travaux dont les prix ont été anormalement gonflés ou fictifs, donne un total de quatorze milliards (14 000 000 000) Francs CFA surfacturés par EBOMAF la complicité passive ou active du ministère des Transports, rien que sur le seul marché de l’installation de l’ILS à Korhogo. Cela représente plus de la moitié des vingt-trois milliards cent soixante-quinze millions deux cent mille (23 175 200 000 Francs CFA). Si les mêmes pratiques ont été observées sur le marché initial, consistant à doubler le prix des prestations, sur ce marché total de cent un milliards six cent vingt-neuf millions quatre cent quatre-vingt-seize mille cent douze (101 629 496 112) Francs CFA, le ministère des Transports et EBOMAF auraient pu surfacturer jusqu’à cinquante milliards (50 000 000 000) Francs CFA. De quoi financer la construction de plusieurs lycées et hôpitaux si les caisses de l’Etat n’avaient été privées de ces fonds.

    Tous nos efforts pour obtenir des explications du ministère des Transports et de l’entreprise EBOMAF sont restés vains. Après avoir promis que ses services spécialisés allaient répondre à toutes nos questions, le ministre des Transports s’est brusquement muré dans un silence assourdissant. De même, les emails et messages WhatsApp envoyés à EBOMAF sont restés sans suite. 

    Ce qui est vrai, est vrai !

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