RDC, Mali, Centrafrique, les manifestations hostiles à la présence des opérations Onusiennes de maintien de la paix se multiplient en Afrique. C’est dans ce contexte que se tiendra à Dakar, les 24 et 25 octobre prochain, l’important « Forum de Dakar sur Ia paix et la sécurité en Afrique » qui traitera cette année, de la problématique de « l’avenir de la diplomatie préventive et du maintien de la paix en Afrique », un continent qui concentre l’essentiel des missions de maintien de paix actuellement déployées dans le monde.
Si au Mali les manifestations contre la présence de la MINUSMA ont été moins violentes (pillages et incendie d’une base logistique à Mopti), en République Démocratique du Congo, l’éruption de la violence anti-MONUSCO, notamment dans l’Est de la RDC s’est soldée par la mort de 32 civils et quatre casques bleus en une semaine de manifestations. En RDC avec la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation du Congo, comme pour le Mali avec la Mission multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali, les récriminations de la population se résument en un seul mot : inefficacité.
Complexité de la mission et inadaptation des forces et du mandat
Réagissant aux accusations de peu d’efficacité des missions onusiennes de maintien de la paix, El-Ghassim Wane – patron de la MINUSMA crédité d’une grande expertise dans les questions de maintien de la paix – a justifié les difficultés rencontrées par la complexité des missions qui ont souvent changé de nature, sans pour autant que le mandat et les forces soient ajustés pour répondre aux nouvelles exigences de missions qui se sont parfois transformées en se complexifiant. En RD Congo, la mission avait été déployée pour assurer le respect des accords de paix inter-congolais négociés et signés dans la ville sud-africaine de Sun City par des mouvements rebelles qui ont, depuis, tous disparus à l’issue des élections démocratique de 2006. Arrivée au Congo pour maintenir la paix, la MONUSCO se retrouve aujourd’hui à combattre des groupes armés aux agendas flous et des bandes criminelles lourdement armées et extrêmement violentes, alors qu’elle n’a jamais été préparée pour cette mission.
Idem pour le Mali où la MINUSMA, mandatée pour veiller au respect de l’application de l’accord de paix entre le gouvernement et des mouvements sécessionnistes, se retrouve engagée dans une guerre asymétrique contre des djihadistes.
Devant un parterre d’éditorialistes et Grands Reporters Africains et de la presse internationale réunis dans la capitale sénégalaise et en prélude au « Forum de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique » M. Wane a également fait remarquer la difficulté liée aux missions multiformes assignées aux Opérations de Maintien de Paix (OMP), à la fois dans la sécurité, mais également les réformes politiques, la santé, les droits de l’Homme, l’éducation, l’adduction d’eau, etc.
Ancien Chef d’Etat-Major Général de l’Armée sénégalaise, le général Babacar GAYE qui a dirigé plusieurs opérations onusiennes en Afrique, a fait le constat de ce que « les efforts d’adaptation du maintien de la paix aux conflits actuels semblent avoir atteint leurs limites ». L’une des caractéristiques qui illustre le besoin de repenser le maintien de la paix, selon l’officier supérieur, « réside dans les difficultés à concilier les priorités des trois principaux acteurs de cette activité à savoir les Etats membres, le Conseil de sécurité et le Secrétariat Général » de l’ONU.
Plus que tout, la ministre des Affaires étrangères du Sénégal a mis l’accent sur la difficulté à réunir les financements lorsqu’il s’agit de missions de maintien de paix en Afrique, alors que, a insisté madame Aïssata Tall SALL, « ces questions relèvent de problématiques globales qui devraient concerner tout le monde ».
Face à une Afrique qui a du mal à faire entendre sa voix face aux grandes puissances, le Commissaire aux Affaires Politiques, à la paix et à la Sécurité de la CEDEAO, observe que les opérations de maintien de paix se sont souvent faites au détriment de l’action de prévention pourtant « moins coûteuse et qui, de surcroît, épargne des vies humaines ». Pour Abdel FATAU-MUSAH l’Afrique doit donc mettre l’accent sur la prévention qui éviterait que l’on soit obligé de monter de coûteuses missions de maintien ou d’imposition de la paix dont on aura toujours d’énormes difficultés à mobiliser des financements. « Dans toutes les situations de crises que nous avons connues, il y a eu des alertes qui auraient dû susciter des actions préventives. A ces alertes précoces, il nous faudrait désormais des actions précoces » a conclu le Ghanéen.
De belles discussions en perspectives pour un « Forum de Dakar sur la paix et la Sécurité en Afrique » qui ambitionne de définir ce qui serait la doctrine africaine en matière de prévention des crises et de maintien de la paix. Tout un programme.
Ce qui est vrai, est vrai !
Saïd Penda à Dakar.