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    Inza Camara : Un Consul Général « clandestin » de Côte d’Ivoire à New York

    La nomination de l’époux de la ministre des Affaires étrangères, comme Consul Général de Côte d’Ivoire à New York tourne au fiasco. Inza Camara n’a, à ce jour, reçu ni accréditation, ni carte diplomatique délivrées par les autorités américaines. Conséquence : c’est un diplomate dans la totale clandestinité qui est à la tête du Consulat général de Côte d’Ivoire dans la capitale américaine.

    S’il est vrai que c’est son prédécesseur qui a initié le processus de nomination d’Inza Camara au poste de Consul Général de Côte d’Ivoire à New York, c’est bien son épouse qui le fait nommer officiellement, avant de l’installer dans ses nouvelles fonctions, en violation de toutes les procédures et réglementations.
    En effet, comme il est de coutume pour les diplomates, on propose la personnalité à nommer au pays d’accueil, qui peut répondre favorablement ou s’opposer à la nomination de la personne proposée et solliciter du pays qu’il change son choix. Cette décision qui n’est pas obligée d’être motivée amène ipso facto à remplacer le diplomate qu’on proposait pour le poste. Il ressort de mes investigations que dans le cas d’Inza Camara, le précédent ministre des Affaires étrangères, Ally Coulibaly, avait proposé son nom aux autorités américaines qui n’avaient toujours pas répondu à la requête ivoirienne, plusieurs mois après la demande d’Abidjan. Dans les traditions diplomatiques, une demande qui reste aussi longtemps sans réponse est interprétée comme un refus poli et, généralement, on avise en proposant quelqu’un d’autre pour le poste ou on le laisse vacant pour manifester son mécontentement.
    Le précédent existe entre la Côte d’Ivoire et les Etats-Unis. En effet, lorsqu’au lendemain de la chute de Blaise Compaoré, Washington propose l’ambassadeur qui était en poste à Ouagadougou au moment des évènements qui ont conduit au renversement de M. Compaoré, le président Ouattara refuse d’accréditer en Côte d’Ivoire un diplomate qui a pu jouer un rôle dans la chute de Blaise Compaoré. L’ex-président burkinabé avait justement trouvé refuge dans la capitale ivoirienne. En guise de protestation, les Etats-Unis ont laissé vacant le poste d’ambassadeur en Côte d’Ivoire pendant plusieurs années.
    L’arrivée au ministère des Affaires étrangères de Kandia Kamissoko Camara va faire prendre une nouvelle tournure au dossier de la nomination de son époux. Selon une de mes sources au ministère des Affaires étrangères, alors que l’option était de prendre acte du refus courtois des Américains et proposer quelqu’un d’autre comme Consul Général à New York, l’épouse va littéralement imposer son homme au poste.

    Mensonges et violation des règles…
    D’après plusieurs hauts diplomates au ministère ivoirien des Affaires étrangères avec lesquels je me suis entretenu, le dossier de la nomination de son époux est un des premiers dont elle s’est occupée, dès sa nomination. Comme me l’a révélé un des hauts cadres des Affaires étrangères sous anonymat, malgré les recommandations des diplomates de la maison, qui ont clairement indiqué à la ministre qu’on ne peut introduire le décret de la nomination de son époux en Conseil des Ministres sans l’accord préalable des Etats-Unis, le décret est quand même introduit et adopté le 26 mai 2021, soit un peu plus d’un mois à peine après l’arrivée de Kandia Camara au ministère des Affaires étrangères. Cette violation des procédures provoque un tel tollé que le Secrétaire Général du ministère – un diplomate chevronné qui maîtrise toutes les règles et procédures – a failli démissionner pour ne pas cautionner ce qui représentait à ses yeux une forfaiture. Toutes mes démarches pour faire réagir l’ambassadeur Daouda Diabaté, sont restées vaines, mais plusieurs de mes sources m’ont confirmé cette information. Voilà donc comment on a menti au président Ouattara à qui on a fait nommer un diplomate sans avoir reçu l’approbation préalable du pays d’accueil comme l’exige la procédure. Une de mes sources au ministère des affaires étrangères est formelle : « lorsque le décret de nomination des ambassadeurs est présenté en Conseil des Ministres pour nomination, le président de la république ne peut se douter qu’on n’a pas au préalable obtenu le OK du pays d’accueil ».
    Une fois la nomination obtenue dans les conditions pour le moins mafieuses, puisqu’on a usé de mensonges et que les règles ont été foulées aux pieds, la ministre va aller plus loin en installant son époux, faisant fi du fait qu’il ne pourrait exercer sans avoir reçu son accréditation des autorités américaines. Pour les Consuls Généraux, cette accréditation s’appelle l’exéquatur.
    Le 25 octobre 2021, la ministre des Affaires étrangères fait organiser une cérémonie de passation des charges entre son époux et l’ancienne titulaire du poste, là encore, dans la totale illégalité. En effet, celui qui a présidé cette cérémonie souffre d’un défaut de qualité. Plutôt que de faire présider cette passation de service par l’ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Etats-Unis ou son représentant, c’est plutôt le représentant de la Côte d’Ivoire auprès de l’ONU, Adom Kacou Houaja Léon, qui est sollicité « sur instruction de la ministre » comme me l’a précisé un de mes contacts au ministère des Affaires étrangères.
    J’ai demandé à celui qui était ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Etats-Unis à l’époque, les raisons pour lesquelles ce n’est pas lui qui a présidé la « prise de fonction » d’Inza Camara comme l’exigeait la loi. Mamadou Haïdara, aujourd’hui Conseiller Diplomatique du président de la République, n’a pas voulu répondre à nos questions, invoquant « le devoir de réserve » qu’impose sa fonction.

    Un Consul Général Clandestin
    Dans les faits, pour les Etats-Unis, la Côte d’Ivoire n’a toujours pas de Consul Général à New York, les autorités américaines n’ayant jamais – selon mes informations – délivré d’accréditation à aucun individu pour ce poste, encore moins établi une carte diplomatique à un Ivoirien pour occuper ces charges. Inza Camara est donc, aux yeux de la loi américaine comme il le serait, dans les mêmes circonstances, pour tout autre pays, un usurpateur de titre, un Consul Général clandestin. Le diplomate ivoirien exerce en effet une fonction pour laquelle il n’a reçu aucune autorisation telle que l’exigent les conventions de Vienne qui définissent les règles et pratiques dans le domaine de la diplomatie. Aujourd’hui, tout acte que poserait Inza Camara en se prévalant du titre de Consul Général de Côte d’Ivoire à New York pourrait être frappé de nullité.

    Ce document indique qu’Inza Camara s’est inscrit pour la première fois sur une liste électorale en 1997 dans le comté de New Castle.

    Les raisons du blocage de l’accréditation
    D’après mes informations, plusieurs raisons pourraient expliquer le refus des Américains d’accréditer Inza Camara. Il y a d’abord le fait que les Etats-Unis ne peuvent accréditer comme diplomate un citoyen américain. Or, il ressort des documents et informations en ma possession qu’Inza Camara jouit de la nationalité américaine. J’ai en effet pu retrouver son inscription sur des listes électorales aux Etats-Unis, qui tendent à établir sa qualité de citoyen américain. Des documents que j’ai pu me procurer indiquent que M. Camara s’est inscrit pour la première fois sur une liste électorale en 1997 dans le comté de New Castle. En 2004, il apparaît également sur une liste électorale, cette fois-ci, dans le comté de Philadelphie.
    Si la nationalité américaine d’Inza Camara était confirmée, comme l’indiquent les documents que j’ai pu consulter, la seule possibilité pour lui d’être accrédité comme diplomate aux Etats-Unis serait qu’il renonce à la nationalité américaine. Or, selon certains de ses proches que j’ai pu contacter, il ne veut nullement renoncer à sa citoyenneté américaine. Un diplomate au ministère ivoirien des Affaires étrangères qui m’a parlé sous l’anonymat conclut que « visiblement, plutôt que de se plier à la loi, Inza Camara espère que ce soient les Américains qui modifient la loi pour s’adapter à ses desiderata ».
    L’autre raison qui pourrait expliquer le refus des américains d’accréditer Inza Camara serait liée à de possibles démêlés judiciaires ou à quelques réserves sur sa moralité. J’ai réussi à me procurer des relevés du ministère de la Justice des Etats-Unis qui révèlent une partie du casier judiciaire de monsieur Inza Camara. Ce document fait ressortir que le Consul Général a eu maille à partir avec la justice à trois reprises. Une fois pour une infraction, les deux autres fois étant pour des affaires classées comme criminelles par la Justice américaine.
    Dans mes investigations, j’ai consulté un autre document qui relève que M. Inza Camara a partagé la même carte de sécurité sociale, délivrée en Pennsylvanie, avec une autre personne, un certain Iuzu Camara. J’ai retrouvé ce nom, Iuzu Camara, dans un document officiel qui recense les parents de Inza Camara, aux côtés de noms plus connus comme Kandia Camara, Macy Camara, Fama T. Camara, Aida Massani Camara et Ismaël Camara. Selon mes contacts, ce mystère est encore sous investigation des autorités américaines qui tenteraient de s’assurer que le préposé au poste de Consul Général de Côte d’Ivoire à Washington n’a pu être mêlé à un trafic de documents d’identité. La pratique est souvent utilisée par des sans-papiers pour rechercher un emploi en se servant des documents de quelqu’un d’autre.
    J’ai approché le ministère des Affaires étrangères et M. Inza Camara afin qu’ils puissent donner leur version de cette affaire qui gêne dans les rouages de la haute administration, et dont le régime du président Ouattara, dont nul ne peut douter de la probité, se serait bien passé. Après avoir demandé à pouvoir apporter l’équilibre à une investigation qu’il présageait curieusement à charge, le ministère des Affaires étrangères a finalement choisi de ne pas répondre à mes questions. Inza Camara a lui aussi opté pour le silence.
    Ce qui est vrai, est vrai !

    4 Commentaires

    1. Merci pour l’éclairage et surtout pour l’aide que tu apportes au travers de tes plumes pour une coteD’ivoire digne sans corruption et avec a la clef la fin des détournements de deniers publics.
      Après lecture nous attendons la justification des mises en causes afin de pouvoir une conclusion.

    2. C’est vraiment décevant de voir des personnes proches du PRADO le tromper de cette façon. Qu’Allah face en sorte que cette marmaille atteigne ses oreilles.
      Ce qui est vrai est vrai !

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